Suzanne

Nouvelle écrite par Juliette BERTRAND et Jeanne MEUNIER élèves de 3ème au collège Auguste et Louis Lumière de Besançon – professeur : Mme Sylvie Vernier

 

En juillet 1870, après un an d‘échanges de menaces entre la France et l’Empire prussien, une guerre éclata.

Monségur, une ville du Sud-Ouest de la France, pas encore touchée par la conflagration, abritait des centaines de personnes dont deux femmes : Justine et sa nièce Suzanne.
Celle-ci était une orpheline de dix-neuf ans ; sa mère était morte lors de son accouchement et son père pendant la guerre de la seconde indépendance italienne de 1859.
Cela faisait donc onze ans qu’elle résidait chez sa tante et toutes deux vivaient paisiblement.


Le 20 juillet 1870, comme chaque matin, Suzanne s’assit sur son fauteuil pour lire les actualités du jour. Sans surprise, elle découvrit que la guerre était officiellement déclarée entre la France et la Prusse depuis la veille. Elle s’y attendait depuis longtemps et éprouvait une sorte de haine envers les Prussiens qui voulaient récupérer la couronne d’Espagne.
Elle avait envie de livrer bataille pour sa patrie, mais elle était une femme…et une femme, en 1870, avait l’interdiction de combattre ! Plus les jours passaient, plus cette idée l’obsédait : pourquoi ne pouvait-elle pas partir au front comme tous ces hommes ?


Elle décida donc de prendre une apparence masculine : elle se rasa entièrement le crâne, travailla sa voix pour qu’elle soit plus grave et récupéra des costumes dans la malle de son père. Vêtue de l’un d’eux, elle alla s’enrôler ; elle réussit à échapper à la visite médicale en montrant un faux certificat qui affirmait que le soldat Pierre M. était apte au combat. Puis on lui remit un uniforme de l’Armée française qui lui donnait le droit de guerroyer.


Accoutrée en militaire, elle alla annoncer à sa tante qu’elle allait combattre pour la France. Justine, qui ne s’attendait pas à cette nouvelle, s’effondra, tant elle redoutait de ne jamais la revoir. Elle lui confia sa peur que l’identité de Suzanne soit révélée et que cela ait des répercussions sur la vie de sa nièce et la sienne. Mais la jeune fille ne céda pas à ces craintes.

Durant un mois, Suzanne travailla durement pour se préparer et s’informer, grâce à la presse, de l’avancée de la guerre, le tout discrètement pour échapper aux échanges avec sa tante.

 Le 16 août, elle prit le train pour Saint-Privat afin de participer au prochain combat. Le voyage se déroula sans encombre. Après avoir rejoint les autres soldats et accédé à un dortoir, elle somnola quelques instants, angoissée à l’idée de se faire remarquer et de perdre la vie. Le lendemain, elle participa aux exercices d’entraînement des nouvelles recrues.

Le soir, épuisée, elle s’endormit. Plus tard, réveillée en sursaut par des cris, elle comprit qu’il fallait partir au front, elle s’habilla rapidement et suivit ses compagnons d’armes.
Ils se rendirent à la place principale de la commune, là où les Prussiens les attendaient.
Elle se plaça au dernier rang et avança vers le centre du combat.
elle se révéla une redoutable combattante, tua quelques Prussiens, mais surtout se défendit bien et avança dans la mêlée, sans se faire toucher.

Les combats se firent quotidiens. Sa vie était rythmée par le réveil à l’aube, les dures journées d’entraînement physique, les combats dans lesquels elle s’améliorait de jour en jour.

Au bout d’un mois, Suzanne, que tout le monde connaissait sous le nom de Pierre, était devenue une des meneuses des combats. C’était une des figures de son régiment. Mais certains soldats commençaient à avoir des doutes par rapport à son genre et ils  en discutaient entre eux.

Un d’eux décida de lorgner Suzanne au moment de la douche et découvrit sa réelle identité. Il accourut vers ses compagnons pour leur annoncer sa découverte.
Tous tombèrent d’accord pour l’expulser du régiment : ce n’était pas possible qu’une femme représente la France ! Tous, sauf un, Emilien qui était proche de « Pierre » et ne voulait pas perdre cette amitié.

Mais des soldats malveillants se rendirent auprès du général afin de l’informer de la présence de Suzanne. Elle se fit congédier très rapidement, ce qui accabla Emilien.
elle quitta alors Saint-Privat le plus rapidement possible. L’Armée ne pouvait pas la retrouver car elle ne connaissait que sa fausse identité ; mais cette affaire fut dévoilée dans le journal.

La jeune femme rentra à Monségur discrètement et retrouva sa tante, rassurée de la revoir : elle venait de lire le journal et avait peur que Suzanne soit morte.

Quand la guerre s’acheva, Suzanne avait depuis longtemps repris sa routine quotidienne. Un jour, elle lut les noms des soldats de sa région qui étaient invités à une cérémonie de remise de médailles militaires : le nom de Pierre M., bien sûr, ne figurait pas dans la liste…