La pie et les serpents

 Nouvelle écrite par Paul COSME

sur le thème « Plaidoyer et lobbying, jeux d’influence dans l’élaboration des lois »

 

            La pie, sur un arbre perchée, vit

            Le Cocala qui passait par ici

            « Quel bon vent vous amène ? » chante-t-elle.

            « C’est simple, ma bonne dame,

            Le conseil de la jungle m’interdit

            De plus en plus de produire

            Mes fameuses cannes à sucre.

            Voilà ce qu’ont dit ces bonobos :

            Il y a trop de gros. »

 

            Aussitôt dit, aussitôt fait

            Le Cocala eut à peine trottiné,

            Que la pie s’envola

            Et sur l’épaule du chimpanzé se posa.

            « Mon doux messire, mon doux député,

            Que vous êtes beau, que vous êtes musclé.

            Le conseil veut passer un amendement,

            Qui embêterait mon client.

            Le Cocala a beaucoup de monnaie,

            Il pourrait vous en donner,

           Comme vous êtes gentil,

           Avec grande envie. »

 

Un conseil se tint quelques jours plus tard,

Sur une place nommée La Mare.

Le lion se tenait au milieu,

Avec, autour, ces députés curieux.

La pie se trouvait sur l’estrade,

Aux côtés du Cocala.

Un siège demeurait vide

C’était celui du jaguar,

Qui était maintenant en retard.

C’était un de ces rares plaidoyers,

Qui se battaient pour : la survie de l’humanité.

La pie s’avança,

Et annonça :

« Messieurs, je ne suis pas là pour mentir,

Mais, les faits, il faut les dire… »

Alors sa phrase fut coupée net,

Par le jaguar qui criait d’une voix fluette. 

« C’est inadmissible !

Indicible !

Un chasseur a voulu m’assassiner,

C’est un coup monté ! »

« Balivernes. répondit calmement la pie

            Mais notre réunion n’est pas finie.

            Le jaguar est enfin arrivé,

            Nous pouvons donc continuer. »

            Ce fut au tour du Cocala qui s’écria

« Je ne comprends pas ! »

            Le jaguar répliqua :

            « Il n’y a que des gras. »

            La pie prit les choses en main :

            « Messieurs sans cette industrie-là,

            C’est 70% du marché qui disparaitra.

            De plus, nous avons créé des filtres

Pour diminuer le taux de sucre. »

Le fauve ne se découragea point.

« Peut-être, mais vous possédez, par malheur,

Le titre du plus grand pollueur. »

« Des résultats erronés,

Nos emballages sont recyclés.

Nos produits sont efficaces et sains,

Et en 2050, 10 milliards d’êtres humains.

Comment comptez-vous les nourrir ? »

Le jaguar reprit.

« En 2050, nous allons tous mourir,

Tués par vos pots d’échappements

Et par vos pesticides, évidemment.

Messieurs les Députés,

Notre planète est en danger.

La crise est là,

L’urgence est là.

Vous n’avez que l’argent à la bouche.

Oui ! Perçons cette foutue couche.

Nos enfants ne vous pardonneront jamais !

Agissez ! »

 

 

L’amendement fut voté.

Malgré un droit chimpanzé.

 

La pie, sur son arbre, retourna,

Et s’assit devant un sordide repas,

Elle redoutait ce plat,

Où grouillaient un amas de couleuvres.